Les actualités du droit, janvier 2023

L’accès au droit par le recours en justice

En musique avec DIANNE REEVES

Le 3 novembre 2010, un concert de rêve au Chatelet, avec Dianne Reeves entourée de deux grands guitaristes Russell Malone et Romero Lubambo. Les guitares chantent comme la diva, on est dans les sommets.

Focus sur…

« Droit et liberté, c’est la même chose ».
Ah bon ?

Il faut revenir sur cette histoire de « constitutionnalisation du droit à l’avortement ». 

Les aventures tribalistes de l’Oncle Sam

Je rappelle qu’à l’origine, c’est une idée bizarre provoquée par le revirement de la Cour suprême des Etats-Unis (Amérique du Nord, territoire indien occupé). Le 24 juin 2022, l’arrêt de la Cour Dobbs vs Jackson Women’s Health Organization inverse la jurisprudence Roe vs Wade de 1973 : un Etat fédéral peut adopter une loi d’interdiction de l’IVG. Désolé pour les femmes qui vivent dans ce pays, mais il n’y a jamais eu de majorité parlementaire pour donner un régime légal au droit à l’avortement : c’est un fait, reflet d’une classe politique décalée. Le droit relevait d’une décision de justice… obtenue de justesse, et qui a été remise en cause du fait d’une modification de la composition de cette Cour. Aussi, voir les parlementaires « de Gauche » vouloir modifier notre Constitution en réaction à cette modification de la jurisprudence US est incompréhensible. Je ne sais pas qui a fait le lavage de cerveau, mais je constate que le cerveau a été lavé, et c’est du travail de pro. 

Cette Cour suprême ne peut avoir la moindre influence sur notre droit parce que c’est un Etat étranger… et parce qu’elle n’a aucune crédibilité internationale. En effet, les Etats-Unis refusent de s’inscrire dans le droit international, et refusent donc de ratifier les textes fondateurs des droits de l’homme. C’est ainsi : nous n’avons pas le même langage juridique. Pour en rester au sujet qui nous concerne, les Etats-Unis n’ont ratifié ni le Pacte international relatif aux Droits économiques, sociaux et culturels, ni la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, ni même la Convention relative aux droits de l’enfants. Et il rejettent toutes les juridictions internationales : la Cour interaméricaine des droits de l’homme (l’équivalent de notre CEDH), le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU, et la Cour pénale internationale… Seul maître chez moi : ce n’est pas le droit moderne, mais le tribalisme juridique. Pourquoi pas si ça leur va, mais ce tribalisme ne peut avoir une influence quelconque sur la pratique d’un Etat démocratique, inscrit dans les mécanismes internationaux de protection des droits et libertés. 

Aussi, cette urgence réactionnelle pour modifier la Constitution ne repose pas sur la raison juridique. En réalité, personne n’est dupe, le cri du cœur juridique n’était en réalité qu’un petit jeu politique. Les droits de l’opposition politique sont hélas marginalisés au sein du Parlement, et l’opposition ne retrouve l’initiative de l’ordre du jour que pour des temps très limités, appelés « des niches » (faut le faire…), et depuis sa niche, l’opposition ne peut pas faire grand-chose. Elle essaie des coups malins, d’où l’idée de cette proposition de loi constitutionnelle de deux lignes, avec une grosse communication politique en appui.

Alors, que dit ce texte sur l’IVG ?   

En novembre 2022, l’Assemblée votait pour un nouvel article 66-2 de Constitution : « La loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ». La formule était intéressante par « l’effectivité et l’égal accès au droit à… », mais le début de la phrase était cocasse. C’était à la Constitution de garantir, pas à la loi.

Ce 1er février, alors qu’il avait exprimé un refus, le Sénat finalement vote pour, mais avec son propre texte qui ajoute un alinéa à l’article 34 de la Constitution : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse ».

Et tout le monde parlementaire, de droite et gauche, se félicite de cet excellent texte, sur le thème « droit et liberté, c’est la même chose ». Vu de loin, c’est effectivement un bloc : les droits et libertés, garantis par l’état de droit dans la démocratie. Ce sont des données nobles, confortant le sort des personnes et la qualité de la vie sociale. Mais vu de près, c’est bien différent. 

Les libertés…

Les premières à apparaître juridiquement, ce sont les libertés, très proches de la philosophie des Lumières : l’être humain est libre, et la loi doit lui permettre de vivre ses libertés. Le texte de référence, c’est la Déclaration de 1789, avec son magnifique article 1 : « Les hommes naissent et restent libres et égaux en droits ». Libres et égaux, allons de l’avant et laissons les citoyens vivre leurs libertés. Le rôle de la loi est de lever les obstacles à l’exercice de ces libertés. C’est l’Etat-gendarme qui protège les libertés en éliminant les entraves. 

L’effet positif est flagrant : c’est le triomphe du libéralisme… mais ce sera très vite un accroissement des injustices et de la violence sociale comme jamais. Les libertés ne valent que pour ceux qui ont les moyens de l’exercer, et les autres sont privés de tout. Les femmes n’accèdent au droit de vote qu’en 1945. Ce régime des libertés est le pilier juridique de la révolution industrielle, avec la construction de la société inégalitaire dont nous avons hérité. Sans entrave et sans intervention régulatrice de l’Etat, cette liberté fonde dans les mines et l’industrie métallurgique le contrat signé entre les patrons et les enfants, qui librement ont déterminé les conditions du travail. Et l’enfant qui ne signe pas est effectivement libre de le faire. 

… et les droits

Les profits issus de ce libéralisme ont mené le monde, et il faudra le constat objectif d’une misère jamais connue et la crise de 1929 pour que s’impose progressivement le correctif qui change tout : il n’y a de libertés que s’il y a les moyens de ces libertés. Le paradigme n’est plus la liberté comme terre de conquête humaine, mais le droit à…, soit pour chaque citoyen le droit à un socle de moyens mis à disposition par l’Etat pour garantir un accès effectif aux libertés. L’Etat n’est plus le gendarme protecteur des libertés des puissants, mais l’acteur de l’accès aux libertés, par l’octroi de moyens et de garanties institutionnelles. Le dangereux Etat-gendarme laisse la place au vigilant Etat-providence. Pour le citoyen, tout change. Quand il nait, il n’est plus seulement bercé par l’article 1 sur la liberté et l’égalité. Il est entouré de droits dont il pourra requérir l’application, quelle que soit sa situation de fortune : droit à l’éducation, droit au travail, droit à la protection de la santé, droit à la sécurité sociale… 

Le texte de référence est le Préambule de la Constitution de 1946, qui rend acceptable la Déclaration de 1789 car elle apporte les moyens de l’égalité par l’Etat-providence.

Pour citer quelques articles :

« 3. La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme.

« 10. La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

« 11. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ».

Aussi, la liberté sans référence au droit, c’est de la gesticulation juridique, qui ne mène pas loin. 

Le droit à la liberté de…

Les textes actuels utilisent la formule « le droit à la liberté de… », comme par exemple la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne de 2000 : 

Art. 6 : « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté » ; 

Art. 7 : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications » ; 

Art. 9 : « Le droit de se marier et le droit de fonder une famille sont garantis selon les lois nationales qui en régissent l’exercice » ; 

Art. 10 : « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion » ; 

Art. 11 : « Toute personne a droit à la liberté d’expression. »

On trouve la liberté, avec tout ce que cela signifie de libre arbitre et de choix personnel dans la vie, mais adossé à un droit, et l’Etat est donc impliqué pour assurer une pratique effective des libertés par tous. Il s’agit de textes fondamentaux, qui n’ouvrent pas sur des droits absolus qui ruineraient la vie en société, mais le mécanisme du « droit à la liberté de… » est tout-à-fait essentiel. La CEDH a poursuivi le raisonnement avec le notion d’« obligations positives » à la charge de l’Etat pour que les droits ne soient pas proclamés mais deviennent effectifs. 

On fait le test pour l’IVG, et ce serait : « La Constitution garantit le droit à la liberté de la femme de recourir à l’interruption volontaire de grossesse ». Là, ce serait déjà mieux. Avec le texte du Sénat, qui fait consensus, on en est loin. Regardons ça de près.

Le texte du Sénat ne résiste pas crash test avec la réalité 

La formulation du Sénat « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse » ne vaut pas grand-chose. C’est du 1789 réchauffé. Examen de détail.

En premier lieu, la réforme est mal partie car on manœuvre déjà pour éviter le référendum. Un peu de droit constitutionnel. Il s’agit d’une proposition de loi, la fameuse niche parlementaire, et non pas d’un projet gouvernemental, de telle sorte que l’entrée dans la Constitution suppose un référendum. Très bien, un vote du référendum après une belle et fière campagne marquera l’attachement du peuple à la protection de l’IVG, c’est le but affiché… Sauf que les parlementaires redoutent un rejet de ce référendum, et ils s’orientent vers  un deal avec le gouvernement, pour que celui-ci reprenne le texte à son compte dans un projet de loi. Ce projet, après un nouveau vote des deux assemblées, pourra être inscrit dans la Constitution par un vote au 3/5eme des deux chambres réunies en Congrès. Le texte serait dans la Constitution, grâce au gouvernement, avec un vote des parlementaires pour shunter le vote du peuple, alors qu’il s’agit de conforter un acquis du peuple… Ce bidule est essoufflé dès l’origine.

En deuxième lieu, l’amendement constitutionnel laissera une grande marge de manœuvre à une éventuelle future majorité extrémiste. La loi « détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse », et le législateur aura donc toute liberté pour déterminer des conditions minimales, avec in fine la liberté d’aller pratiquer l’avortement dans un pays à la législation plus protectrice. 

En troisième lieu, cette rédaction par une majorité extrémiste ne serait en rien compromise par une censure du Conseil constitutionnel. Si un jour est votée une loi minimaliste, un recours sera formé devant le Conseil constitutionnel, et celui-ci rejettera inévitablement le recours en jugeant que la loi nouvelle « a déterminé les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse », bref, que le Parlement a rempli son office. En l’absence de « droit à… », la Constitution ne serait pas violée dès lors que la loi laisserait une liberté même minimaliste, et la liberté de pratiquer l’IVG à l’étranger. Encore plus simple : la loi de finances limiterait le budget, les centres devraient licencier, les rendez-vous deviendraient trop lointains… Et on ferait quoi ? On déposerait un requête devant le Conseil constitutionnel ? Ces parlementaires ne sont pas sérieux.

En quatrième lieu, la réforme d’une Constitution est plus difficile que celle d’une loi – la preuve – mais elle n’est pas impossible, et une autre majorité pourrait défaire cet amendement, soit par la majorité qualifiée du Congrès, soit par le référendum. Les votes sur les referendums sont facilement transformables en plébiscites pour le gouvernement, et avec une bonne manip’ politique, tout est possible.

En cinquième lieu, le débat de fond, donc les racines, reste intact. Le texte n’aborde pas le principe juridique qui fonde la question. Or, ce principe n’est pas la proclamation d’une liberté de la femme, qui n’est qu’un débat de second temps, mais la protection de la vie. Protéger la vie de ses concitoyens, c’est le premier devoir de l’Etat, pas de doute là-dessus. Mais à partir de quand ? Depuis la naissance ? Depuis la conception ? Depuis un certain stade de développement du fœtus, et lequel ? 

Le législateur pose une analyse fondamentale, avec l’article 16 du Code civil : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Le respect de l’être humain dès le commencement de la vie inclut-il la protection de la vie ? Non, ce sont deux choses différentes, mais le débat n’est pas tranché, et surtout pas au niveau constitutionnel. En écho à l’article 16, l’article L. 2212-1 du Code de la santé publique pose le principe de l’IVG : « La femme enceinte qui ne veut pas poursuivre une grossesse peut demander à un médecin ou à une sage-femme l’interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu’avant la fin de la quatorzième semaine de grossesse ».

Le grand débat, il est là. Il est souvent abordé au sein du Parlement et dans la société, mais il n’a jamais tranché par le Conseil constitutionnel, qui se replie – non sans raisons – derrière l’ampleur des débats – scientifiques, sociaux, philosophiques, religieux – pour conclure qu’il n’a pas l’assise pour définir une norme constitutionnelle. Même prudence de la CEDH qui s’incline devant l’absence de consensus en Europe. Aussi, il n’y aura pas de base tant que n’est pas assumé une délibération ferme sur le commencement de la protection de la vie, et on peut vraiment se demander si c’est au législateur de fixer une norme impérative sur une question qui puise tant dans la pensée intime, la philo, les morales… 

  • Ce qui veut dire que ce sera toujours fragile pour l’IVG ? 
  • Oui, une loi tranchant un débat fondamental qui n’est juridique que pour une faible part n’est pas envisageable.
  • Et que faire pour protéger l’IVG ? 
  • D’abord, de grands et forts débats publics, pour s’ancrer dans la vie sociale, créer toujours plus de conviction, au lieu de s’accrocher au leurre d’une loi qui interdirait.
  • Et ensuite ? 
  • Doter les centres d’un statut sûr, assurer les effectifs, qualifier l’acte médical, recevoir les femmes dans les meilleures conditions, instaurer des instances pilotes, des comités citoyens, bref tout ce qui peut conforter les acquis, parvenir à parler de l’IVG comme un fait public et non un échec qui se joue dans l’ombre. 
  • Cela suffira ? 
  • Rien ne suffira. On trouvera des sauvegardes pour les situations les plus violentes, comme la maternité issue d’un viol. Mais pour le sort commun, si une majorité se dégage pour interdire l’IVG, elle l’interdira. C’est la démocratie. Alors, la vraie défense, c’est de témoigner, de convaincre et d’engager un plan intraitable pour imposer l’égalité de droit des femmes, car on est loin du but.

Les actualités du droit, janvier 2023

5 janvier 2023 – L’ex-patron de la DGSE mis en examen

Bernard Bajolet, ex-patron de Direction générale de la Sécurité Extérieure (DGSE), les services de renseignement entre 2013 et 2017, a été mis en examen selon les informations du Monde pour complicité de tentative d’extorsion envers un homme d’affaires et pour atteinte arbitraire à la liberté individuelle par personne dépositaire de l’autorité publique.

En 1918, les services secrets se sont trouvés attributaires d’une masse financière constituée par les fonds secrets issus des dommages de la guerre de 14-18, l’idée étant de garder disponible ces fonds pour le gouvernement si l’Etat devait s’écrouler.  

Le dérapage commence dans les années 80 où la DGSE investit cet argent dans une entreprise de luxe… bien mal choisie car elle périclite. Il faut alors sauver en urgence les fonds secrets, et un marché est confié à un affairiste franco-suisse Suisse, Alain Duménil. Le choix est là encore mauvais, et cette fois-ci, c’est une faillite : en version 1, 15 millions d’euros partent en fumée, mais en version 2, les fonds ont transité, à la suite de savants montages, vers des sociétés contrôlées par Alain Duménil.

Les recours juridiques au sein de la galaxie Duménil s’annoncent bien compliqués, d’où une solution divergente avec une inédite interpellation à Roissy en mars 2016.  

Ce jour-là, Alain Duménil s’apprête à embarquer pour un vol en partance pour Genève depuis Roissy-Charles de Gaulle. Au guichet Air France, il est contrôlé par deux fonctionnaires de la police aux frontières. Après lui avoir demandé son passeport, ils prétextent un contrôle plus approfondi et l’invitent à le suivre dans un poste de police. Deux agents de la DGSE, en civil, pénètrent dans la pièce, selon la même source. Se présentant comme « l’Etat », ils lui indiquent qu’il doit rembourser 15 millions d’euros à la France. Pour ce faire, il doit dire à son conseil d’entrer en contact avec un avocat pour fixer les modalités qui lui permettront d’éponger sa dette. Pour appuyer leur requête, ils lui montrent des photos de lui et de sa famille, prises en Angleterre et en Suisse. Selon Alain Duménil, ils auraient proféré des menaces. L’entretien dure quelques minutes, l’homme d’affaires s’emporte et clame son intention de porter plainte. Les agents disparaissent.

En octobre 2022, Bernard Bajolet a été entendu et mis en examen. Il explique aux juges d’instruction avoir validé le principe d’une entrevue à l’aéroport mais ne pas être entré dans les détails de sa mise en œuvre. Il conteste tout grief.

 

5 janvier – Les géants du CAC 40 ont reversé 80 milliards d’euros à leurs actionnaires en 2022 

Les actionnaires des grandes entreprises cotées françaises ont perçu l’année dernière 56,5 milliards d’euros de dividendes, un record historique, auxquels s’ajoutent 23,7 milliards d’euros de rachats d’actions. Un millésime historique, en hausse de 15,5 % par rapport au record établi un an plus tôt, et porté par le bond des dividendes (+23 % à 56,7 milliards d’euros) alors que les rachats d’actions sont restés quasi stables à 23,7 milliards d’euros.

TotalEnergies a versé treize milliards d’euros en dividendes et rachats d’actions l’année dernière ; le groupe de luxe LVMH sept milliards ; le groupe pharmaceutique Sanofi près de cinq milliards d’euros. Dans l’ensemble, Vernimmen souligne qu’il s’agit du niveau le plus haut jamais enregistré depuis la création de l’indice en 2003. Un plus haut, donc, depuis près de 20 ans.

 

6 janvier – Les géants du pétrole ont engrangé plus de 200 milliards de profits en 2022 

Les « superprofits » des pétroliers sont historiques, au point d’avoir dépassé les 200 milliards de dollars en 2022 rien que pour les pétroliers occidentaux. La publication prochaine des résultats annuels d’ExxonMobil, Chevron, TotalEnergies, BP, Shell et consorts devrait confirmer le caractère exceptionnel de l’année 2022, qui a vu les prix de l’énergie s’envoler… et les pétroliers en profiter largement.

A elles deux, les majors américaines ExxonMobil et Chevron vont frôler les 100 milliards de dollars de bénéfices sur l’année. Un total que dépasseront aussi allègrement, ensemble, les quatre principales sociétés européennes du secteur, BP, Shell, TotalEnergies et Equinor. Les profits du Saoudien Aramco et des autres acteurs contrôlés par des Etats seront aussi au sommet.

Le géant français de l’énergie, Total, a par exemple annoncé un bénéfice de 5,7 milliards de dollars au deuxième trimestre, soit une hausse de plus de 60 % par rapport à l’année dernière. 

La compagnie anglo-néerlandaise Shell a enregistré un bénéfice de 11,5 milliards de dollars d’avril à juin 2022, soit plus du double de celui réalisé à la même période en 2021. 

 

6 janvier – Mexique : L’arrestation d’un baron de la drogue provoque des scènes de guerre

Ovidio Guzmán, l’un des dirigeants du ‘Cartel du Pacifique‘ et fils du célèbre El Chapo, a été arrêté par les autorités mexicaines, 6 janvier. Il s’en est suivie des affrontements entre des hommes armés du cartel et les forces de l’ordre, avec le bilan très lourd de 29 personnes décédées, soit 19 trafiquants et dix militaires. Le narcotrafiquant présumé, âgé de 32 ans, a été transféré à Mexico par un avion de l’armée de l’air, où il a d’abord été entendu par le parquet, puis incarcéré à la prison d’El Altiplano. Ovidio Guzmán, le fils d’El Chapo, l’un des plus célèbres trafiquants mexicains, aujourd’hui incarcéré aux États-Unis. 

L’aéroport de Culiacán (Mexique), a été sous le feu des narcotrafiquants qui cherchaient à bloquer le trafic aérien, ils n’hésitent pas à viser un avion civil. Dans les rues de Culiacán, c’était des scènes de chaos avec des camions incendiés. La bataille a fait 29 morts, Malgré le bilan dramatique, Luis Cresencio Sandoval, ministre de la Défense mexicain, s’est félicité : « Cette arrestation représente un coup retentissant contre les dirigeants du cartel du Pacifique ». Une opération qui vient effacer une humiliation historique. En octobre 2019, Ovidio Guzman avait été brièvement arrêté, puis relâché sur ordre du président mexicain, Andres Manuel Lopez Obrador, après un violent soulèvement à Culiacan consécutif à son arrestation. Le président avait justifié sa décision en arguant qu’un bain de sang avait ainsi été évité. 

Ovidio Guzman, alias « El Raton » (la souris), est considéré comme le chef de Los Menores, une faction du cartel de Sinaloa fondé il y a quatre décennies par son père, qui purge actuellement une peine de prison à vie aux Etats-Unis (1). Il est le plus connu du clan de Los Chapitos, qui comprend ses trois autres frères Joaquin Guzman, Ivan Archivaldo et Jesus Alfredo. 

Le cartel de Sinaloa est considéré par l’Agence américaine antidrogue (DEA) comme le principal responsable du trafic de fentanyl, une drogue 50 fois plus puissante que l’héroïne, qui a causé de nombreux décès par overdose aux Etats-Unis.

 (1) « Le narcotrafiquant mexicain El Chapo demande l’annulation de sa condamnation à la justice américaine », Le Monde, 22 octobre 2022. « Mexique : l’incroyable évasion du grand parrain El Chapo », Emmanuelle Steels, Libération, 12 juillet 2015.

 

8 janvier – Etats-Unis : de nouveaux documents confidentiels retrouvés chez Joe Biden, une enquête indépendante diligentée

Après une première découverte de documents classifiés en novembre dans un ancien bureau de Joe Biden, les avocats du président ont mené des recherches approfondies dans ses résidences de Wilmington et Rehoboth Beach (Delaware). C’est dans ce cadre-là que cette deuxième série de documents a été trouvée. La plupart se trouvaient dans un espace de stockage du garage de la maison.

Comme pour les premières découvertes, les documents ont été remis au ministère de la justice.

Le ministre de la justice américain, Merrick Garland, a nommé jeudi un procureur indépendant pour enquêter sur les documents retrouvés : « J’ai signé un document nommant Robert Hur procureur spécial qui l’autorise à enquêter sur toute personne ou entité qui pourrait avoir violé la loi ».

Selon la loi sur les archives présidentielles (Presidential Records Act), les documents officiels, classifiés ou non, doivent être déposés aux Archives nationales après le départ d’une administration.

Le cas de Trump est plus sérieux, la police fédérale (FBI) ayant saisi des milliers de documents, dont une centaine classée secret-défense. Mais les découvertes récentes restent embarrassantes pour le président démocrate, qui a longtemps mis en avant son exigence éthique par opposition à son prédécesseur. 

Le plus drôle, c’est que ce sont les avocats qui dénoncent. Dans ce pays, l’avocat qui découvre une infraction commise par son client doit la dénoncer au procureur.

 

9 janvier – Des lois confuses, bavardes et pauvres, fondées sur l’émotion

Le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour : « Tout magistrat, qu’il appartienne au siège ou au parquet dans notre pays, est et reste le serviteur de la Constitution et de la loi. Il est plus que jamais le gardien des promesses démocratiques dans un monde où la loi a évolué et dans le mauvais sens. Comme l’a souligné Jean-Marc Sauvé, ancien vice-président du Conseil d’État, elle était brève, claire et riche. Elle est devenue confuse, bavarde et pauvre et elle est de plus en plus fondée sur l’émotion ressentie par le fait divers. Le comité des États généraux a montré combien sa mise en œuvre laissait à désirer faute de véritables études d’impact et dans un contexte de sous-dotation des moyens dédiés, ce qui a fait dire à la Cour des comptes que chaque réforme faite dans ces conditions aggravées en réalité la situation. Le comité des Etats généraux l’a martelé et je pensais que le message avait été compris. J’en ai douté quand j’ai vu le mois dernier l’Assemblée nationale adopter une proposition de loi accordant des juridictions spécialisées en matière de violences faites aux femmes sans aucuns moyens supplémentaires.

Sacha Houlié, le président de la commission des Lois à l’Assemblée (Renaissance), en a été tout fâché, reprochant à François Molins, de « s’immiscer dans le processus législatif et de s’écarter du principe de séparation des pouvoirs ». Y-a-t-il quelqu’un pour offrir au grand Sacha un article sur la liberté d’expression ?  

 

11 janvier : Derrière les remontrances de façade, la France et les Etats-Unis renforcent leur coopération avec Israël

Les diplomaties états-unienne et française jouent publiquement les effarouchées devant la politique du nouveau gouvernement Netanyahou, mais sur le terrain, rien n’a changé, bien au contraire.

Pour la première fois, la réunion des conseillers du commerce extérieur (CCE) de la France de la région Proche et Moyen-Orient et Sud Méditerranée s’est tenue à Tel Aviv du 11 au 15 janvier, dans le sillage des accords d’Abraham signés en septembre 2020 entre Israël et les Emirats arabes unis (EAU), le Bahreïn puis le Soudan et le Maroc . C’est business, et là, pas de malaise : cette rencontre a battu un record de participation – une centaine de patrons, au lieu de 50 à 70 habituellement, le rassemblement le plus important d’acteurs économiques français jamais organisé en Israël.

Coté militaire, c’est pas mal non plus : L’armée israélienne et le Commandement central des États-Unis (CENTCOM) ont conduit dans la semaine leur plus grand exercice conjoint jamais réalisé en Israël et en Méditerranée orientale, selon un communiqué des deux armées. Quelque 6 400 soldats américains ont participé à l’exercice, baptisé Juniper Oak 2023, aux côtés de plus de 1 500 soldats israéliens, ainsi que plus de 140 avions, 12 navires et des systèmes d’artillerie. Il s’agit du plus grand exercice conjoint jamais organisé entre les deux pays.

 

12 janvier – La Grande-Bretagne refuse le rapatriement en Grèce des marbres du Parthénon

Depuis 1983 et une demande officielle de la ministre de la culture grecque, Melina Mercouri, la Grèce réclame la restitution d’une frise de 75 mètres détachée du Parthénon ainsi que d’une des célèbres cariatides provenant de l’Erechtheion, petit temple antique également sur le rocher de l’Acropole, toutes deux pièces maîtresses du British Museum. Londres affirmait que les sculptures avaient été « acquises légalement » en 1802 par le diplomate britannique Lord Elgin, qui les avait revendues au British Museum. Ces marbres sont surnommés les Elgin Marbles, du nom de ce diplomate. Mais la Grèce répliquait qu’il s’agit d’un « pillage » commis quand le pays était sous occupation ottomane.  

Ces derniers temps, la situation paraissait pourtant évoluer : selon la presse grecque et britannique, le directeur du British Museum, George Osborne, était en pourparlers avec la Grèce. Un accord sur le rapatriement de certaines de ces œuvres, sous forme de prêt, était sur le point d’être conclu, mais, sur la BBC, la ministre de la Culture, Michelle Donelan, a mis fin cette semaine aux spéculations : « Nous ne devrions pas les renvoyer. Ils ont leur place ici, au Royaume-Uni, où nous en avons pris soin pendant très longtemps, où nous avons permis leur accès avec d’autres objets d’art de la nation. Cela ouvrirait la porte à la question de l’ensemble de notre contenu dans nos musées, et c’est donc une pente très glissante à suivre ».

 

14 janvier – Le plus gros gisement européen de terres rares découvert en Suède

La société minière publique LKAB a annoncé l’identification d’un gisement géant de terres rares au nord de la Suède. Elle travaille à l’exploitation de ses résidus miniers et participe à un projet d’acier vert. Le PDG de LKAB, entreprise publique qui exploite la mine de Kiruna depuis 1890, a déclaré avoir identifié dans cette région un gisement estimé à plus d’un million de tonnes de terres rares, soit le plus grand de ce type en Europe. Ce gisement s’avère essentiel pour la production des matières premières critiques cruciales pour la transition verte : « Nous sommes confrontés à un problème de fourniture. Sans mines, il ne peut pas y avoir de véhicules électriques » se félicite le PDG du groupe public LKAB, Jan Moström.

La Chine raffine actuellement quelque 90 % des terres rares utilisées dans le monde. Il s’agit de composants essentiels à la transition énergétique, notamment pour les voitures électriques et les turbines d’éoliennes, et numérique, pour les ordinateurs et les smartphones. Echaudée par sa dépendance au gaz russe, l’UE cherche à diversifier ses approvisionnements de matières premières et même à relancer l’exploitation minière sur son territoire.

La Suède se positionne en pionnière des industries vertes, surtout dans le nord du pays, en mettant en avant ses grands espaces, ses ressources hydroélectriques et ses températures fraîches, qui permettent de refroidir les centres de serveurs à bon compte. 

 

16 – L’ONG Oxfam et les milliardaires

Portées par la flambée des cours de bourse, les grandes fortunes se sont envolées au cours des dix dernières années : sur 100 dollars de richesse créée, 54,4 dollars sont allés dans les poches des 1% le plus aisés, tandis que 70 centimes ont profité aux 50% les moins fortunés, constate l’ONG. Les milliardaires ont doublé leur fortune, tout en étant de plus en plus nombreux, affirme Oxfam.

Depuis 2020, deux tiers des richesses produites dans le monde sont détenues par les 1% les plus riches. Des milliardaires qui auraient gagné 2,7 milliards par jour depuis la crise du Covid-19. Le principal constat de cette vaste enquête menée par Oxfam est donc l’accélération de la concentration des richesses aux mains d’une toute petite minorité alors que pour la première fois depuis 25 ans l’extrême pauvreté est repartie à la hausse.

D’après le magazine Forbes, Bernard Arnault est le troisième homme le plus riche de la planète. Il possède officiellement une fortune de 158 milliards de dollars, et même 179 milliards estime Oxfam. C’est l’équivalent de l’argent possédé par 20 millions de Français.

Or, « la concentration extrême des richesses mine la croissance économique, corrompt les politiciens et les médias, corrode la démocratie et augmente la polarisation », écrit l’ONG, concluant que les inégalités sont devenues « une menace existentielle pour nos sociétés, paralysant notre capacité à endiguer la pauvreté », et mettent « l’avenir de la planète en péril ».

Selon Oxfam, la taxation a un rôle « crucial » à jouer afin de diminuer le nombre de milliardaires sur la planète, et doit toucher les revenus et le capital des plus aisés. Parmi les mesures proposées dans ce rapport, un impôt exceptionnel sur la fortune, une taxe sur les dividendes, et une hausse de l’imposition sur les revenus du travail et du capital des 1% les plus riches. Le capital, une manne financière « beaucoup plus importante que les salaires » pour les grandes fortunes, doit être davantage taxé sur les gains réalisés, notamment grâce à la vente d’actions, mais aussi par la simple détention, souligne l’organisation.

Voir son rapport spécifiquement consacré à la France

 

17 janvier – Jacinda Ardern, la première ministre néo-zélandaise, annonce sa démission

Déclaration inattendue de la dirigeante lors d’une réunion du Parti travailliste : « Je pars, car un poste avec d’aussi grands privilèges s’accompagne de grandes responsabilités. La responsabilité de savoir quand vous êtes la bonne personne pour diriger et aussi quand vous ne l’êtes pas. Je sais ce que ce travail exige. Et je sais que je n’ai plus assez d’énergie pour lui rendre justice. C’est aussi simple que cela. »

On la regrettera. Première ministre à 37 ans dans un gouvernement de coalition, elle est devenue l’année suivante, la deuxième cheffe de gouvernement au monde à avoir eu un enfant pendant son mandat.

Très populaire dans son pays, elle avait montré une grande force de caractère après les attentats de Christchurch, en mars 2019, avec 51 personnes tuées par un suprémaciste blanc. Elle avait porté un voile pour rendre visite aux familles musulmanes endeuillées, signant les idées de solidarité et d’ouverture d’esprit. A Trump lui avait demandé comment aider son pays, elle lui avait répondu d’envoyer « de la sympathie et de l’amour aux musulmans ». 

Sa gestion de la pandémie de Covid-19 avait aussi été plébiscitée : elle avait rapidement fermé les frontières et opté pour un confinement sévère, avec de bons résultats à la clé. Mais l’horizon s’est obscurcit pour la Gauche au pouvoir, qui va devoir moins de sociétal, et plus d’économique et social.

 

18 janvier – Brésil : plus de 1 000 personnes à juger

Plus de 1 000 personnes pourraient être inculpées après les tentatives d’insurrection du 8 janvier à Brasilia : un défi logistique pour la justice brésilienne.

Plus de 2 000 personnes ont été arrêtées immédiatement après le saccage, à Brasilia, des trois centres du pouvoir que sont le Palais présidentiel, le Congrès et la Cour suprême par des partisans de l’ancien président d’extrême droite Jair Bolsonaro. Environ 300 personnes ont été détenues sur place, tandis que le reste l’a été dans un campement installé à environ huit kilomètres de là. Neuf jours plus tard, plus de 1 000 personnes étaient toujours en détention.

Le juge de la Cour suprême, Alexandre De Moraes, est chargé de l’enquête. Les détenus doivent répondre de plusieurs chefs d’accusation pour « actes antidémocratiques », dont association criminelle, atteinte au patrimoine, violence contre l’État démocratique et incitation au coup d’État.

L’implication de certains dans le soulèvement est plus difficile à prouver que pour d’autres, mais « si des milliers de personnes appellent à un coup d’État tout en essayant d’envahir des bâtiments publics (…) toute personne qui se trouve là à ce moment peut être considérée comme coupable d’un crime par association ».

Les juges du district de Brasilia recevant l’aide de juges d’autres districts. Les rangs des procureurs ont également été renforcés par des magistrats d’autres régions. Une centaine de procureurs fédéraux travaillent quelque 1 400 cas, avec le soutien d’environ 400 procureurs d’État. Des centaines d’avocats de la défense ont également été impliqués. Sur les 1 400 auditions préliminaires, un millier a débouché sur une demande du parquet de placement en détention préventive. Dans les autres cas, les suspects ont été libérés sous caution ou assignés à résidence en attendant leur procès.

Une fois les audiences préliminaires terminées, les poursuites pénales seront à la charge du bureau du procureur général Augusto Aras. Lundi, ce dernier avait procédé aux premières inculpations avec l’annonce de poursuites à l’encontre de 39 personnes.

 

19 janvier – La justice européenne interdit les dérogations aux néonicotinoïdes

Pour les néonicotinoïdes, ces insecticides mis en cause dans la mortalité des abeilles, les Etats membres de l’Union ne peuvent passer outre l’interdiction de mise sur le marché et d’utilisation de semences traitées avec des produits phytopharmaceutiques qui contiennent ses substances controversées.

« Ces mesures d’interdiction ont été adoptées pour garantir le niveau élevé de protection de la santé des animaux recherché au sein de l’Union », ont fait valoir la Cour de justice européenne (CJUE). Les Etats membres ayant accordé des dérogations, parmi lesquels la France, doivent donc y mettre fin sans délai.

En 2018, la Commission avait adopté des réglementations imposant des restrictions strictes sur leur utilisation. Depuis, l’usage en plein champ, pour des cultures, de trois d’entre elles était proscrit. Mais, devant les difficultés rencontrées par certains agriculteurs, onze pays dont la France , ont délivré des autorisations temporaires. Saisie du cas de six autorisations accordées en 2018 par la Belgique, la Cour de justice les a jugées illégales.

Les planteurs français arguent que les betteraves ne faisant pas de fleurs, elles n’attirent pas les pollinisateurs et ne les mettent pas en danger. Ils rappellent en outre que des recherches sont en cours pour trouver de nouvelles variétés de semences permettant de ne plus utiliser ces insecticides. Les chercheurs les promettent d’ici à deux ou trois ans.

Du côté des ONG, la satisfaction est grande. « Il s’agit d’une grande victoire pour les écologistes », a réagi Générations Futures, qui a demandé au gouvernement français qu’il « retire immédiatement sa proposition de nouvelle dérogation ».

 

20 janvier – La caisse de grève de la CFDT de 141 millions d’euros 

En 1973, lors de son congrès annuel, la CFDT avait décidé de créer la première caisse de grève confédérale, alimentée par une partie des cotisations que versent ses adhérents… adoptant le modèle de la Confédération des syndicats chrétiens belge, qui dispose d’un trésor de guerre centenaire pour soutenir financièrement ses adhérents lorsqu’ils se mettent en grève. 

Pionnière en France, la CFDT reste aujourd’hui la seule organisation syndicale du pays à avoir fidèlement suivi ce modèle. Le premier syndicat de salariés du privé dispose ainsi de 141 millions d’euros qui ne peuvent être utilisés que pour aider financièrement ses adhérents ayant suivi un appel à la grève maison. 

Tout adhérent qui a commencé à cotisé depuis plus de 6 mois a droit à une compensation dont le montant atteint aujourd’hui 7,70 euros de l’heure dès lors qu’il a passé plus de 7 heures à faire la grève. Les nouveaux membres doivent se contenter de la moitié de cette somme et, pour, éviter, les comportements opportunistes, un adhérent inscrit au début d’un conflit n’a droit à rien.

S’ils devaient être intégralement utilisés, les 141 millions d’euros de la caisse de grève permettraient donc d’assurer un soutien financier aux quelques 600.000 adhérents du syndicat pendant l’équivalent d’une semaine de travail de 35 heures.

 

21 janvier – Français dans les camps syriens : Paris viole la Convention contre la torture, estime l’ONU

En refusant de rapatrier les femmes et les enfants de nationalité française qui sont détenus dans des camps syriens, la France enfreint la Convention contre la torture.

Selon le Comité contre la torture, même si l’Etat français « n’est pas à l’origine des violations subies, il demeure toujours dans l’obligation de protéger ses ressortissants contre des violations grave des droits humains en prenant toutes les mesures nécessaires et possibles. Ne pas prendre de mesures efficaces pour les protéger et ne pas les rapatrier constitue une violation de la convention ». La France doit transmettre au comité les décisions prises pour donner suite à ces observations dans les quatre-vingt-dix jours.

Le Comité avait été saisi en 2019 par des familles de ces femmes et enfants considérant que la France, en ne procédant pas à leur rapatriement, contrevenait aux articles 2 et 16 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Le gouvernement avait argumenté que la convention n’imposait pas à un pays de protéger ses ressortissants dans un territoire qui n’est pas sous sa juridiction. En outre, la France « n’a aucunement la capacité de procéder aux rapatriements », évoquant la responsabilité des autorités locales et des mères.

La France a déjà été condamnée en 2022 par le Comité des droits de l’enfant puis par la Cour européenne des droits de l’homme pour la même raison. Après des années de traitement au cas par cas, la France a procédé à deux rapatriements de femmes et de mineurs, en juillet et en octobre dernier.

 

23 janvier – Cameroun : la mort d’un journaliste accuse le pouvoir

Martinez Zogo, 51 ans, était le directeur général de la radio privée Amplitude FM, basée à Yaoundé, et l’animateur vedette d’une émission quotidienne, « Embouteillage », diffusée du lundi au vendredi et très écoutée dans la capitale camerounaise. 

Son corps a été découvert à 15 kilomètres au nord de Yaoundé, selon les sources journalistiques, mais le gouvernement est resté silencieux. Martinez Zogo avait été « enlevé » quatre jours plus tot devant un commissariat de la périphérie de Yaoundé. 

Le Syndicat national des journalistes du Cameroun a dit dans un communiqué sa « consternation », dénonçant un « assassinat odieux » et appelant les travailleurs des médias à se vêtir de noir le 25 janvier pour marquer leur deuil. L’International Press Institute, organisation de défense de la liberté de la presse basée à Vienne, a exhorté les autorités camerounaises à « enquêter rapidement sur le meurtre horrible du journaliste Martinez Zogo et de veiller à ce que les coupables soient traduits en justice ». 

Cyrielle Rolande Bechon, directrice de l’ONG camerounaise Nouveaux droits de l’Homme, demande aux autorités des réponses : « Je crois que les Camerounais demandent à savoir la vérité sur ce cas. On pense que c’est le cas de trop. Nous voulons croire encore que le Cameroun est un État de droit. On veut croire à cette lueur qui est qu’il y a quand même des gens qui dirigent ce pays et que ces gens-là n’ont pas pour vocation de semer la terreur, mais qu’ils ont effectivement quelque part, dans le fond, envie de préserver un État, et que toutes les personnes, impliquées d’une manière ou d’une autre dans cette affaire doivent répondre de leurs actes ».

 

25 janvier – L’incroyable enquête sur l’explosion au port de Beyrouth 

Le juge Tarek Bitar a décidé de reprendre son enquête sur cette explosion qui avait fait plus de 200 morts et 6 500 blessés, après une suspension de plus d’un an, malgré les énormes pressions politiques auxquelles il est soumis.

Il a décidé d’inculper huit nouvelles personnes, dont le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, et trois autres juges, inculpés pour « homicide, incendie criminel et sabotage ».

L’énorme explosion du 4 août 2020 avait été provoquée par le stockage sans précaution de centaines de tonnes de nitrate d’ammonium dans un entrepôt au port, et Ghassan Oueidate avait supervisé en 2019 une enquête des services de sécurité sur des fissures dans l’entrepôt où était gardé le nitrate d’ammonium sans mesures de sécurité.

La réponse du procureur général, Ghassan Oueidat, a été rapide. Mercredi, il a ordonné la libération de tous les suspects détenus depuis l’explosion – un éventail de fonctionnaires qui avaient travaillé au port, bien en dessous des maîtres politiques qui l’avaient taillé en fiefs qui avaient enrichi chaque faction majeure au Liban.

Il a engagé des poursuites conte le juge Tarek Bitar pour « rébellion contre la justice » et « usurpation de pouvoir ». Il est en outre frappé d’une interdiction de quitter le territoire libanais.

À la suite de cette annonce, Tarek Bitar a réagi expliquant qu’il refusait de se dessaisir de l’investigation : « Je suis toujours chargé de l’enquête et je ne me dessaisirai pas de ce dossier. Le procureur n’a pas la prérogative de me poursuivre ».

« La loi ne permet pas au procureur général d’ordonner la libération des détenus. Celui qui a ordonné leur arrestation est le seul habilité à demander leur libération », estime l’ancien procureur général Hatem Madi. Mais pour Ghassan Khoury, avocat général près la Cour de cassation et qui fait partie des responsables poursuivis par le juge Bitar, « le parquet général est en droit d’ordonner la remise en libération des détenus en vertu de l’article 137 du code de procédure pénale ». 

 

28 janvier – Guerre en Ukraine : le Brésil refuse d’envoyer des armes à Kiev

Certains pays d’Amérique latine sont attachés à leur neutralité. Lula a rejeté la demande du gouvernement allemand de fournir des munitions de chars Leopard-1 pour être transmises à l’Ukraine. 

Alors que le chef de l’armée de terre brésilienne Julio Cesar Arruda vantait les intérêts économiques d’une telle livraison, le président brésilien s’est opposé à une telle opération, arguant «qu’il ne valait pas la peine de provoquer les Russes», détaille le journal Folha. Cette décision du nouveau chef d’État brésilien serait intervenue la veille du limogeage de Julio Cesar Arruda de son poste de commandement.

 

29 janvier – Inde : Une «idéologie de la haine»

Tushar Gandhi, arrière-petit-fils du Mahatma Gandhi, a exhorté dimanche les étudiants à « emprunter le chemin de l’éducation » pour contrer la « haine échangée en Inde ». Il déplore que le pays marche rapidement vers la voie de la haine : « Ma génération n’a peut-être plus beaucoup d’années à vivre maintenant, mais c’est ma détermination à combattre la haine envers mes petits-fils et leurs petits-fils… Ce devrait être la priorité pour tous de recoller avec amour le tissu social divisé de ce pays. Si vous ne pouvez pas être un bon être humain, vos diplômes ne sont d’aucune utilité. La vraie connaissance ne vient que lorsque vous pouvez éveiller l’humanité ». Il a également exhorté les femmes à ne pas abandonner l’éducation pour le mariage et à continuer à acquérir des connaissances et à réussir.

 

31 janvier – Le pape dénonce le « colonialisme économique qui se déchaîne » en Afrique

En visite en République démocratique du Congo, le Pape a dénoncé le « colonialisme économique qui se déchaîne en Afrique et en République démocratique du Congo, : « Ôtez vos mains de la République démocratique du Congo, ôtez vos mains de l’Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter ni une terre à dévaliser ». Où va-t-il chercher tout cela…