Les actualités du droit, décembre 2022

L’accès au droit par le recours en justice

En musique avec TOM JOBIM

Tous mes vœux de bonheur, de santé… et de beauté, avec le moment sublime qu’est un concert de Tom Jobim

Focus sur…

L’histoire de Catherine

L’excellent Ouest-France nous a rapporté l’histoire Catherine. 

Catherine avait étudié l’histoire de l’art à l’université de Caen. Par la suite, elle avait trouvé du travail comme formatrice pour adultes, avant d’intégrer l’Education nationale, et elle a exercé comme institutrice près de Lisieux. C’était très bien, mais tout s’est embrouillée en 2017 : une perte de confiance au sein de l’institution, et des difficultés conjugales. Elle finit par se séparer de son mari et tombe en dépression. Elle ne supporte plus le travail, et à 55 ans, elle abandonne l’Éducation Nationale. La voici seule, avec un petit logement mais sans travail. 

Mécaniquement, les impayés se sont alourdis, et au fond de sa dépression, Catherine a manifestement raté quelques solides recours, via la CAF ou en saisissant le tribunal. Une dérive au fil de l’eau. La crise liée à la pandémie de Covid-19 a aggravé la situation, et comme si cela ne suffit pas, se fait diagnostiquer un cancer du sein, aujourd’hui traité. Avec 20 000 euros d’impayés, elle doit quitter son logement. 

Catherine ne prend que quelques affaires et son chien, un braque allemand, qu’elle doit déposer pour quelque temps dans un refuge. Elle trouve une chambre dans un foyer d’urgence. L’ancienne institutrice a alors seulement droit à l’Allocation de solidarité spécifique (ASS).

Après plusieurs mois dans ce foyer, Catherine se fracture la clavicule. Elle doit être hospitalisée, séjour pendant lequel elle apprend qu’elle a perdu sa place dans le foyer.

Grâce à des contacts, elle parvient à trouver une chambre dans un hôtel Ibis Budget, à Hérouville-Saint-Clair. Un patron remarquable, qui accepte les chiens, et héberge aussi d’autres sans-abri. Cependant, après une semaine, Catherine est priée de quitter les lieux : « Mon chien a gratté la peinture, on m’a dit qu’il était trop gros ». 

Plus rien ? Il reste une tente, et l’ex-institutrice plante sa tente à proximité de l’hôtel, et la voici dans la plus grande précarité, avec son fidèle chien. Un nouveau cercle de solidarité se met en place : un salarié de l’hôtel offre une tente étanche, un architecte apporte des couvertures. L’hôtel lui sert un petit-déjeuner, permet l’accès aux sanitaires et au micro-ondes, recharge son téléphone et sa bouillotte électrique. Le cas émeut : des passants et riverains apporte une aide à travers divers gestes, parfois un billet. Trois mois sous la tente, et l’hiver s’approche. Elle a régulièrement la visite de la police municipale qui passe pour s’assurer de sa sécurité, mais, passé minuit, il ne reste que le 17.

Un jour, un passant reconnait cette dame : c’était son institutrice du CP, et la discussion s’engage : « mais comment en est-on arrivé là ? ». Le lendemain, le 9 décembre, l’ancien élève est venu chercher Catherine et son chien pour les installer dans un gite à Vimoutiers.

Document 

Comment le colonialisme britannique a tué 100 millions d’Indiens en 40 ans

Entre 1880 et 1920, les politiques coloniales britanniques en Inde ont fait plus de victimes que toutes les famines en Union soviétique, en Chine maoïste et en Corée du Nord réunies.

Par Dylan Sullivan, Étudiant diplômé au Département d’économie politique de l’Université de Sydney et Jason Hickel, Professeur à l’Institute for Environmental Science and Technology (ICTA-UAB) et membre de la Royal Society of Arts

Publié le 2 décembre 2022 sur aljazeera.com.

Ces dernières années ont vu une résurgence de la nostalgie de l’empire britannique. Des livres très médiatisés tels que Niall Ferguson’s Empire : How Britain Made the Modern World, et Bruce Gilley’s The Last Imperialist, ont affirmé que le colonialisme britannique avait apporté prospérité et développement à l’Inde et à d’autres colonies. Il y a deux ans, un sondage YouGov a révélé que 32 % des Britanniques sont activement fiers de l’histoire coloniale du pays.

Cette image en rose du colonialisme est en contradiction dramatique avec les archives historiques. Selon les recherches de l’historien économique Robert C Allen, l’extrême pauvreté en Inde a augmenté sous la domination britannique, passant de 23 % en 1810 à plus de 50 % au milieu du XXe siècle. Les salaires réels ont diminué pendant la période coloniale britannique, atteignant un nadir au XIXe siècle, tandis que les famines devenaient plus fréquentes et plus meurtrières. Loin de profiter au peuple indien, le colonialisme était une tragédie humaine avec peu de parallèles dans l’histoire enregistrée.

Les experts s’accordent à dire que la période de 1880 à 1920 – l’apogée de la puissance impériale britannique – a été particulièrement dévastatrice pour l’Inde. Les recensements complets de la population effectués par le régime colonial à partir des années 1880 révèlent que le taux de mortalité a considérablement augmenté au cours de cette période, passant de 37,2 décès pour 1 000 habitants dans les années 1880 à 44,2 dans les années 1910. L’espérance de vie est passée de 26,7 ans à 21,9 ans.

Dans  un article récent de la revue World Development, nous avons utilisé des données de recensement pour estimer le nombre de personnes tuées par les politiques impériales britanniques au cours de ces quatre décennies brutales. Des données solides sur les taux de mortalité en Inde n’existent qu’à partir des années 1880. Si nous l’utilisons comme référence pour la mortalité « normale », nous constatons que quelque 50 millions de décès supplémentaires se sont produits sous l’égide du colonialisme britannique au cours de la période de 1891 à 1920.

Cinquante millions de morts, c’est un chiffre stupéfiant, et pourtant c’est une estimation prudente. Les données sur les salaires réels indiquent qu’en 1880, le niveau de vie dans l’Inde coloniale avait déjà chuté de façon spectaculaire par rapport à ses niveaux précédents. Allen et d’autres universitaires affirment qu’avant le colonialisme, le niveau de vie des Indiens était peut-être « comparable à celui des régions en développement de l’Europe occidentale ». Nous ne savons pas avec certitude quel était le taux de mortalité précolonial de l’Inde, mais si nous supposons qu’il était similaire à celui de l’Angleterre aux XVIe et XVIIe siècles (27,18 décès pour 1 000 habitants), nous constatons que 165 millions de décès supplémentaires se sont produits en Inde durant la période de 1881 à 1920.

Bien que le nombre précis de décès soit sensible aux hypothèses que nous faisons sur la mortalité de base, il est clair qu’environ 100 millions de personnes sont mortes prématurément au plus fort du colonialisme britannique. Il s’agit de l’une des plus grandes crises de mortalité induites par les politiques de l’histoire de l’humanité. Il est supérieur au nombre combiné de décès survenus lors de toutes les famines en Union soviétique, en Chine maoïste, en Corée du Nord, au Cambodge de Pol Pot et en Éthiopie de Mengistu.

Comment la domination britannique a-t-elle causé cette énorme perte de vies ? Il y avait plusieurs mécanismes.

D’une part, la Grande-Bretagne a effectivement détruit le secteur manufacturier indien. Avant la colonisation, l’Inde était l’un des plus grands producteurs industriels au monde, exportant des textiles de haute qualité aux quatre coins du globe. Le tissu de pacotille produit en Angleterre ne pouvait tout simplement pas rivaliser. Cela a commencé à changer, cependant, lorsque la Compagnie britannique des Indes orientales a pris le contrôle du Bengale en 1757.

Selon l’historien Madhusree Mukerjee, le régime colonial a pratiquement éliminé les tarifs indiens, permettant aux produits britanniques d’inonder le marché intérieur, mais a créé un système de taxes et de droits intérieurs exorbitants qui empêchait les Indiens de vendre du tissu dans leur propre pays, et encore moins de l’exporter.

Ce régime commercial inégal a écrasé les fabricants indiens et a effectivement désindustrialisé le pays. Comme le président de l’East India and China Association s’est vanté devant le parlement anglais en 1840 : « Cette société a réussi à transformer l’Inde d’un pays manufacturier en un pays exportateur de produits bruts. » Les fabricants anglais ont obtenu un énorme avantage, tandis que l’Inde a été réduite à la pauvreté et ses habitants ont été rendus vulnérables à la faim et à la maladie.

D’autre part, les colonisateurs britanniques ont établi un système de pillage légal, connu des contemporains sous le nom de « drain de richesse ». La Grande-Bretagne a taxé la population indienne et a ensuite utilisé les revenus pour acheter des produits indiens – indigo, céréales, coton et opium – obtenant ainsi ces produits gratuitement. Ces biens étaient ensuite soit consommés en Grande-Bretagne, soit réexportés à l’étranger, les revenus empochés par l’État britannique et utilisés pour financer le développement industriel de la Grande-Bretagne et de ses colonies de peuplement – les États-Unis, le Canada et l’Australie.

Ce système a vidé l’Inde de biens d’une valeur de milliards de dollars en monnaie d’aujourd’hui. Les Britanniques ont été impitoyables en imposant le drain, forçant l’Inde à exporter de la nourriture même lorsque la sécheresse ou les inondations menaçaient la sécurité alimentaire locale. Les historiens ont établi que des dizaines de millions d’Indiens sont morts de faim au cours de plusieurs famines politiques considérables à la fin du XIXe siècle, alors que leurs ressources étaient détournées vers la Grande-Bretagne et ses colonies de peuplement.

Les administrateurs coloniaux étaient pleinement conscients des conséquences de leur politique. Ils ont vu des millions mourir de faim et pourtant ils n’ont pas changé de cap. Ils ont continué à priver sciemment les gens des ressources nécessaires à leur survie. L’extraordinaire crise de mortalité de la fin de l’époque victorienne n’était pas un accident. L’historien Mike Davis soutient que les politiques impériales de la Grande-Bretagne « étaient souvent les équivalents moraux exacts des bombes larguées à 18 000 pieds ».

Notre recherche révèle que les politiques d’exploitation de la Grande-Bretagne ont été associées à environ 100 millions de décès supplémentaires au cours de la période 1881-1920. Il s’agit d’un cas simple de réparations, avec de solides précédents en droit international. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne a signé des accords de réparation pour indemniser les victimes de l’Holocauste et, plus récemment, a accepté de verser des réparations à la Namibie pour les crimes coloniaux qui y ont été perpétrés au début des années 1900. Au lendemain de l’apartheid, l’Afrique du Sud a versé des réparations aux personnes qui avaient été terrorisées par le gouvernement de la minorité blanche.

L’histoire ne peut être changée et les crimes de l’empire britannique ne peuvent être effacés. Mais les réparations peuvent aider à remédier à l’héritage de privations et d’iniquités que le colonialisme a produit. C’est une étape cruciale vers la justice et la guérison.

Les actualités du droit, décembre 2022

1er décembre – Maroc : la détention de l’opposant et avocat Mohamed Ziane.

Encore le double standard : il ne faut pas gêner notre ami le Maroc, qui est sourcilleux. Donc, on ne dit rien de la mise en détention de Mohamed Ziane, ex-ministre des Droits de l’Homme et ancien bâtonnier de Rabat, âgé de 80 ans, jugé pour des motifs illusoires, et incarcéré alors que la Cour ne l’a pas ordonné.

Mohamed Ziane a longtemps exercé son métier d’avocat dans les cercles du pouvoir proche d’Hassan II, dont il avait été ministre des Droits de l’Homme. Progressivement, il avait pris de la distance, et ces dernières années, il faisait partie de ces avocats qui se dressaient devant la répression. Il a notamment défendu Taoufik Bouachrine, un patron de presse d’opposition emprisonné depuis 2018 après avoir écopé de quinze ans de prison pour des « agressions sexuelles » contre huit femmes, des accusations qu’il a toujours niées en dénonçant un procès politique. Mohamed Ziane a également été très impliqué dans le Hirak du Rif, puissant mouvement social qui a agité cette région montagneuse berbère du nord du Maroc en 2016-2017.

Tout part d’une plainte du ministre de l’Intérieur, suite à un communiqué de presse que Mohamed Ziane avait signé en tant sa qualité de coordinateur national du Parti marocain libéral. Une plainte pour de motifs désormais classiques pour les opposants politiques : outrage à des fonctionnaires publics, injure contre un corps constitué, diffamationadultère ou encore harcèlement sexuel. En février, le bâtonnier avait été condamné à trois ans de prison ferme, aux termes d’un procès qui avait été une farce. Il avait fait appel, mais l’arrêt n’était pas disponible

Son fils déplore : « Cette semaine, je suis allé pour essayer d’obtenir une copie de cette décision spéciale… mais elle n’était pas disponible. Ce qui veut dire que lundi, lorsqu’il a été arrêté, le titre de détention n’était pas disponible. La police est arrivée sans aucun titre de détention ».

5 décembre – Précarité étudiante : le CNOUS donne des chiffres

Dominique Marchand, présidente du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Cnous), donne dans Ouest-France des chiffres concrets sur la précarité étudiante : « 1,5 million de repas supplémentaires distribués. En cette rentrée 2022, on atteint un taux de fréquentation jamais vu dans l’histoire des Crous. Entre l’an dernier et cette rentrée, pour les deux premiers mois, on constate 17 % d’augmentation d’activité ». Le nombre de boursiers qui mangent au Resto U a augmenté de 15%, mais il y a une forte hausse de la fréquentation des étudiants non boursiers.

Un étudiant, qui vit avec un peu moins de 450 € chaque mois, témoigne : « Sans le Resto universitaire à 1 €, je ne sais pas comment je mangerais ».

6 décembre – Grande-Bretagne : Un projet minier vraiment pourri

Le gouvernement britannique a donné son aval à un projet de mine souterraine de charbon métallurgique dans le comté de Cumbrie, dans le nord-ouest de l’Angleterre. C’est la première mine de charbon profonde à être creusée au Royaume-Uni depuis une génération, avec une autorisation d’extraire 2,8 millions de tonnes de charbon à coke par an du site. Le gouvernement plastronne : « Ce charbon, qui devrait autrement être importé, sera utilisé pour la production d’acier et pour la production d’électricité ». L’affaire est confiée à la société West Cumbria Mining, qui se présente comme une entreprise locale avec un bureau à Whitehaven et promet de fournir 500 emplois aux habitants de la région. 

En réalité, West Cumbria Mining appartient à une société d’investissement en capital-investissement, EMR Capital, avec une base dans le paradis fiscal des îles Caïmans, et les patrons sont tous des requins des grandes sociétés minières.

Situé sur la côte près de Whitehaven, le projet avait suscité un torrent de critiques d’ONG environnementales et de scientifiques, estimant que ce projet remettait en cause la crédibilité du gouvernement dans la lutte contre le changement climatique. Cette mine émettra environ 400 000 tonnes de gaz à effet de serre par an, ce qui équivaut à mettre 200 000 voitures supplémentaires sur la route. L’ancien président de la Cop26, Alok Sharma, a demandé au gouvernement de ne pas ouvrir cette mine.

Même l’industrie sidérurgique ne veut ni n’a besoin de ce charbon. L’« acier vert » utilise des fours à arc électrique (EAF) pour produire de l’acier à partir de fer à réduction directe (DRI).  British Steel a déclaré qu’il était peu probable qu’il utilise le charbon, en raison de sa forte teneur en soufre ? Aussi, 85% du charbon sera exporté à l’étranger par ce gros menteur de gouvernement.

8 décembre – Le ministère de l’Intérieur censure une librairie de Nice

Le ministre de l’Intérieur s’est rendu à Nice, notamment pour une visite au futur hôtel des polices. Oui, mais voilà, juste en face, se trouve la librairie Les Parleuses, dirigée par Anouck Aubert, qui explique : «Quand nous avons appris que le ministre de l’Intérieur venait en visite juste en face de notre librairie, et seulement quelques jours après avoir reçu Hélène Devynck, auteur de L’Impunité, un ouvrage consacré au combat des femmes qui auraient été victimes, comme elle, d’agressions sexuelles de la part de Patrick Poivre d’Arvor, nous avons décidé de coller des affiches et d’écrire en gros justement « Impunité ». Et elles ont donc affiché différents messages féministes sur leur devanture : « Qui sème l’impunité récolte la colère », « Violeurs on vous voit, victimes on vous croit », et un « Sophie on te croit », adressé à la femme qui accuse Gérald Darmanin lui-même de viol.

Mais juste avant l’arrivée du ministre, une quinzaine de CRS et de policiers sont venus dissimuler les collages à l’aide de bâches et de tasseaux de bois, sans aucune base légale : « On arrache les messages qui sont à l’extérieur, on met des rideaux noirs devant ceux qu’on ne peut arracher parce qu’ils sont à l’intérieur ». La librairie Les Parleuses n’a pu rouvrir normalement qu’après le départ du ministre.

Depuis, un mouvement de soutien s’est étendu, et des libraires reproduisent sur leurs propres murs la vitrine censurée, avec le mot d’ordre « On ne nous bâchera pas, on ne vous lâchera pas ».

Pour Soazic Courbet, la gérante de L’Affranchie à Lille qui est à l’origine du mouvement de soutien, l’affaire de la vitrine niçoise n’est que « le prolongement du processus de silenciation des victimes de violences sexistes et sexuelles. Le système patriarcal cherche à étouffer la parole des femmes parce qu’il n’assume pas ses actes, mais aussi parce qu’il se sait au-dessus de tout. Ce soutien collectif est une évidence, car l’intimidation peut paralyser, surtout lorsqu’elle vient de la police et de l’État, alors que de notre côté nous n’avons que les mots et les livres pour nous défendre ». 

La librairie Les Parleuses a saisi le tribunal administratif de Nice pour faire annuler cette décision de censure. 

11 décembre – Au Honduras, une commission internationale contre la corruption 

La présidente hondurienne Xiomara Castro s’est rendue à New York ce 11 décembre afin de sceller l’installation d’une commission internationale de lutte contre la corruption dans son pays. Cette CICIH sera similaire à une structure approuvée par l’ONU qui a commencé à fonctionner au Guatemala en 2008, composée de magistrats et d’enquêteurs étrangers.

L’ONU a accepté de créer cette commission car le crime organisé est ancré dans des institutions sensibles. Il existe un précédent, connu sous le nom de Mission de soutien à la lutte contre la corruption et l’impunité au Honduras (MACCIH), a commencé ses travaux en 2016 et a découvert la corruption de nombreux fonctionnaires, membres du Congrès et hommes politiques liés à l’ ancien président hondurien Juan Orlando Hernandez .

Par ailleurs, le gouvernement du Honduras a annoncé qu’il suspendrait certains droits constitutionnels dans certaines zones de deux principales villes soit la capitale, Tegucigalpa, et la ville septentrionale de San Pedro Sula, parce qu’elles sont contrôlées par des groupes criminels dans les zones les plus pauvres.

La corruption s’est installée au cœur de l’Etat après les 12 ans de règne du Parti national, qui le 28 juin 2009, soutenu par les États-Unis, avait renversé par un coup d’Etat le président de gauche Manuel Zelaya. Le président Juan Orlando Hernández était un chef mafieux. En avril 2022, Juan Orlando Hernández a été extradé vers les États-Unis pour des accusations de trafic de drogue et d’armes à feu. Il est maintenant détenu à New York.  

En janvier 2022, Xiomara Castro a gagné les élections, portée par un mouvement populaire qui s’était opposé à la violence de l’Etat. Lors de son investiture, elle était entourée de la vice-présidente des Etats-Unis, du vice-président de Cuba, du roi d’Espagne, et du chancelier du Venezuela.

Le Honduras connait un taux de 74% de pauvreté, ce qui en fait le deuxième pays le plus pauvre après Haïti. Sur le plan économique, la priorité est de rétablir la structure agricole, tuée par signature de l’accord de libre-échange avec les États-Unis, de telle sorte que Le Honduras importe presque toute sa nourriture, ce qui le rend très dépendant des US, économiquement et politiquement.

12 décembre – Nouvelle-Zélande : vers une interdiction de fumer

La Nouvelle-Zélande, qui veut devenir un pays sans tabac d’ici à 2025, a adopté une loi mettant en place une augmentation annuelle de l’âge légal pour fumer. Ainsi, toutes les personnes nées le 1er janvier 2009 ou après cette date ne pourront plus acheter de cigarettes à l’avenir. Un moyen d’interdire la cigarette à la prochaine génération. 

La ministre de la Santé, Ayesha Verrall, explique : « Des milliers de personnes vivront plus longtemps et en meilleure santé, et le système de santé bénéficiera d’un gain de 5 milliards de dollars en n’ayant pas à traiter les maladies causées par le tabagisme, comme de nombreux types de cancer, des crises cardiaques, des accidents vasculaires cérébraux et des amputations ». L’objectif reste de devenir un pays sans tabac d’ici 2025. Un objectif « à portée de main ».

Cette loi s’accompagne d’une série d’autres mesures visant à rendre le tabagisme moins abordable et moins accessible. La quantité légale de nicotine dans les produits du tabac va être réduite et les points de ventes vont être limités à des magasins spécialisés, quittant les étales des magasins de quartier et des supermarchés. 

13 décembre – La France verse 140 millions d’aide publique au développement à la Chine

140 millions d’euros. Voici le montant que la France a versé à la Chine en 2020 au titre de l’aide publique au développement (APD). Cette somme la place à la neuvième place parmi les 30 principaux bénéficiaires de l’APD bilatérale de la France, selon un rapport joint en annexe au projet loi de finances 2022. La Chine n’est ainsi qu’à quelques marches de la Somalie (343 millions d’euros), du Maroc (312 millions) et de l’Inde (230 millions). Au total l’an dernier, la France a distribué 12,4 milliards d’euros à l’ensemble des allocataires de l’APD, soit 0,53% du revenu national brut (RNB). Pour la Chine, on a un peu de peine à comprendre. Le motif vient de l’OCDE qui considère toujours la Chine comme un pays en voie de développement, en raison de son PIB par habitant, soit 9.608 dollars, avec le 72e rang mondial. Pas vraiment convaincant pour la 2eme puissance économique du monde.

14 décembre – Drame migratoire de Melilla : Amnesty International dénonce une « tuerie de masse »

Amnesty International dénonce la violence dont ont fait preuve les autorités marocaines et espagnoles ce 24 juin 2022 lorsque près de 2 000 clandestins, en majorité originaires du Soudan, avaient tenté de pénétrer dans l’enclave de Melilla, située sur la côte nord du Maroc. 

Selon le rapport de l’ONG, qui a recueilli de nombreux témoignages de migrants présents le 24 juin à la frontière entre le Maroc et Melilla et analysé des vidéos et images satellites, « les méthodes employées par les autorités marocaines et espagnoles […] ont contribué à la mort d’au moins 37 personnes ». Et 77 autres sont « toujours disparues », ajoute le rapport qui évoque une « tuerie de masse ».

De plus, les autorités des deux pays n’auraient pas fourni « de secours médical adapté » : « Ils ont refusé l’accès à la Croix-Rouge et ont laissé des personnes, les corps amoncelés sans assistance pendant au moins huit heures sous 30 degrés à l’ombre. Des personnes ont pu mourir à ce moment-là. Ce qui s’est passé après aussi, c’est que des personnes ont été expulsées par bus à plus de 1 000 kilomètres pour certaines. D’autres disent avoir été emprisonnées et torturées en prison du côté marocain. On atteint un degré d’inhumanité qui est vraiment incroyable ».

Amnesty dénonce par ailleurs « la non-coopération totale de l’Espagne et du Maroc sur les enquêtes », 

Le premier bilan effectué par Human Rights Watch avait conclu à des chiffres proches et appelait le Maroc, l’Espagne et l’Union européenne – oui car Melilla, c’est une terre européenne en Afrique – à faire des enquêtes au niveau de ce drame. Six mois plus tard, on constate leur carence totale. Une violation intégrale de la convention sur les droits de l’enfant. Il est vrai qu’il s’agissait d’enfants somaliens, donc peut-être pas si égaux que cela.

14 décembre – La clémence est un outil pour la justice

Intéressante tribune de Cynthia W. Roseberry, Directrice par intérim de l’ACLU, la grande organisation US de défense des droits humains. 

Elle commence par citer la gouverneure de l’Oregon, Kate Brown, qui annonce avoir commué le sort de toute personne dans le couloir de la mort dans son État, rejoignant un groupe bipartite de gouverneurs qui utilisent leur pouvoir de clémence pour remédier à l’injustice systémique : « La peine de mort est immorale. C’est une punition irréversible qui ne permet pas de correction. C’est un gaspillage de l’argent des contribuables, qui ne rend pas les collectivités plus sûres, et qui ne peut jamais été administré de manière juste et équitable ». La même Brown a gracié plus de 47 000 habitants de l’Oregon condamnés pour possession de marijuana en vertu d’une loi obsolète de l’État.

En octobre, le président Biden a gracié des milliers de personnes condamnées par le gouvernement fédéral pour possession de marijuana. Il a appelé les gouverneurs à suivre son exemple.

Pour Cynthia W. Roseberry, « La clémence est un moyen pour nos dirigeants élus de fournir un minimum de justice différée à des milliers de personnes et d’envoyer un message puissant : personne n’est à jeter. Jusqu’à ce que la peine de mort soit abolie, la clémence est un puissant outil de gouvernement pour corriger l’injustice. La clémence de l’exécutif est un principe fondamental de cette nation. La Constitution américaine accorde au président le pouvoir de clémence et, en tant que dirigeants d’État, les gouverneurs possèdent également ce pouvoir depuis longtemps. La clémence fait partie intégrante du bureau du président et du gouverneur. Non seulement c’est routinier, c’est moralement juste et politiquement populaire – la plupart des électeurs soutiennent la clémence pour corriger les injustices du système judiciaire pénal. Les secondes chances fournies par la clémence devraient être accessibles à tous ».

Donc dans un système judiciaire bloqué, le droit peut être rétabli par des décisions de l’exécutif.

16 décembre – Le Japon rompt avec le principe de posture défensive

Bouleversement à Tokyo, où le gouvernement rompt avec la posture défensive maintenue depuis l’adoption de la Constitution de 1947, qui affirme le renoncement du Japon à la guerre. Une nouvelle doctrine qui tend à répondre à la montée en puissance de la Chine, au développement nucléaire nord-coréen, au rapprochement sino-russe depuis le début de la guerre en Ukraine, et les tensions autour de Taïwan. De fait, dans le voisinage, la dégradation sécuritaire est patente. Pour le premier ministre, Fumio Kishida, « Le renforcement fondamental de nos capacités de défense est le défi le plus urgent dans cet environnement sécuritaire difficile ». 

Le Japon va entamer un renforcement de ses capacités militaires à hauteur de 320 milliards de dollars ce qui dotera le pays de missiles capables de frapper la Chine et le préparera à un conflit de longue durée, alors que les tensions régionales et l’invasion de l’Ukraine par la Russie alimentent la crainte d’une nouvelle guerre. C’est le plus grand renforcement militaire observé au Japon depuis la Seconde Guerre mondiale. Un document distinct sur la stratégie de sécurité nationale promet une coopération étroite avec les États-Unis et d’autres partenaires. 

En 2013, Tokyo appelait à un « partenariat stratégique mutuellement bénéfique » avec son puissant voisin. Une page se tourne, et ce mouvement général de renforcement des armées commence à inquiéter.

18 décembre – Tunisie : Fiasco aux législatives

Les Tunisiens avaient élu, de manière assez inattendue, Kaïs Saïed, dans l’espoir d’une présidence capable de réinsuffler une dynamique de pouvoir, mais le 25 juillet 2021 le président avait gelé le Parlement et limogé le premier ministre, s’emparant de tous les pouvoirs, et annonçant de futures législatives qui allaient lui permettre d’assoir le nouveau tour du régime. 

Sauf que sur place, la vie est difficile : inflation à 10 %, chômage élevé, pénuries de lait, de sucre, de riz, taux de pauvreté touchant quatre millions des douze millions de Tunisiens… Courant décembre, le Fonds monétaire international (FMI) a mis fin aux négociations autour d’un prêt crucial de deux milliards de dollars.

Et là-dessus vient le fiasco des législatives : seuls 11,2 % des électeurs sont allés voter.

L’UGTT, la puissante centrale syndicale, appelle à l’élaboration d’une feuille de route pour sauver le pays de la crise.

19 décembre – Le Danemark supprime un jour férié pour financer son budget de la Défense

« Il y a la guerre en Europe, et nous devons renforcer nos défenses… Cela exigera que chacun contribue un peu plus », a déclaré Mette Frederiksen, première ministre du Danemark. Le royaume scandinave veut atteindre, en 2030 au lieu de 2033, l’objectif de 2% du PIB consacré à la Défense, un critère de l’Otan, contre 1,4% aujourd’hui. Pour ce faire, l’un des onze jours fériés danois va être supprimé. Il s’agit du Store Bededag (jour de prière), introduit en 1656 et célébré le quatrième vendredi après Pâques.

C’est l’une des premières mesures de la nouvelle coalition au pouvoir , qui allie centre-gauche et centre-droit, rapporte la BBC . La réduction des émissions de CO2 et un plus grand investissement dans les dépenses militaires figurent en bonne place dans le programme du nouveau gouvernement.

La présidente de l’association du clergé luthérien, Pernille Vigso Bagge, s’est dite « attristée » par cette nouvelle, alors que la fête du Store Bededag est traditionnellement un grand jour de confirmations au Danemark.

19 décembre – Le charbon, une production record 

Jamais l’humanité n’aura produit autant de charbon qu’en 2022 : 8 milliards de tonnes sont attendues. On pense connaître les raisons à court terme de ce triste record : la crise en Ukraine, la reprise pot-Covid… En attendant, les chiffres sont-là.  

La Chine compte pour 53 % de la consommation mondiale de charbon. En vingt ans, la Chine a multiplié par plus de trois sa consommation.  On a compté une production record de 500 TWh d’électricité à base de charbon, en hausse de 15 % par rapport à l’été 2021. 

En Allemagne, la production a augmenté de 19 % cette année. L’ambition de sortir du charbon dès 2030 , n’a pas pesé lourd face à la menace de pénurie énergétique, et le pragmatisme de la coalition gouvernementale allemande l’a emporté sur toute considération environnementale. Le pays a rouvert 12 centrales, conséquence de l’embargo russe mais aussi du manque d’énergie nucléaire. Berlin ne peut plus importer de France, à cause des défaillances des réacteurs que l’on connaît, et ne peut pas produire non plus suffisamment puisqu’elle a fermé 3 de ses 6 dernières centrales nucléaires. Le charbon couvre désormais plus d’un tiers (36,3 %) de l’électricité produite outre-Rhin, selon les données de l’Office fédéral de la statistique (Destatis).

Depuis le mois d’octobre, douze centrales à charbon d’une puissance maximale de 6,7 gigawatts ont en effet été remises en service afin de passer l’hiver malgré l’absence de gaz russe. Les plus polluantes, au lignite, ne devraient plus fonctionner au-delà du 30 juin 2023 tandis que l’utilisation des autres doit prendre fin en mars 2024 au plus tard.

L’Europe s’est largement ruée vers le charbon, avec une hausse de la consommation de 9%. Cette énergie coûte encore moins cher que le gaz : 400 euros la tonne.

21 décembre – Brésil : avant d’être officiellement président, Lula obtient une victoire politique majeure au Congrès

Lula ne prendra ses fonctions que le 1er janvier 2023, mais il vient d’obtenir une victoire majeure : le Congrès du Brésil a approuvé, le 21 décembre, un amendement à la Constitution qui autorise le futur gouvernement Lula à dépasser le plafond des dépenses pour financer des programmes sociaux. Le texte a été approuvé à une très large majorité par les députés, par 331 votes favorables et 163 contre, ainsi que par les sénateurs, par 66 votes pour et 11 contre. Il devra encore être approuvé article par article avant d’être promulgué.

Cet amendement permet au gouvernement du président Lula d’allouer à des programmes sociaux 145 milliards de reais (environ 26 milliards d’euros) au-dessus du plafond légal des dépenses.

L’autorisation de ces dépenses exceptionnelles vise avant tout à pérenniser l’allocation mensuelle de 600 reais (110 euros) versée aux familles les plus pauvres, un montant déjà en vigueur depuis le mois d’août, sous le gouvernement du président sortant d’extrême droite, Jair Bolsonaro. Lula s’est, en outre, engagé à verser aux familles bénéficiaires une prime de 150 reais mensuels pour chaque enfant de moins de 7 ans.

L’urgence de remettre sur les rails les programmes sociaux et la nécessité de rassurer les milieux d’affaires sur la rigueur budgétaire, ce sera la partition du gouvernement, et cette large majorité au Parlement, décalée du duel serré de la présidentielle, est une excellente chose. Lula reste un négociateur politique hors pair.

27 décembre – Meta, maison-mère de Facebook, paiera 725 millions de dollars dans le scandale de Cambridge Analytica

Le propriétaire de Facebook, Meta Platforms Inc, a accepté de payer 725 millions de dollars pour mettre fin à un recours collectif accusant Facebook d’avoir en 2018 permis au cabinet de conseil politique britannique Cambridge Analytica à accéder aux données de 87 millions d’utilisateurs. De la voyouserie totale.

C’est le règlement de plus important jamais réalisé dans un recours collectif aux US sur la confidentialité des données.

Meta n’a pas admis d’actes répréhensibles et a communiqué sur le thème : je n’ai commis aucune faute, mais il fallait bien sortir de cette affaire. Donc, je suis innocent, mais je paie 785 millions de dollar, et je continue à rouler dans la farine 87 millions d’utilisateurs. 

25 décembre – SMIC : la hausse de 6,6 % mangée par une inflation de 6,2 %

Le SMIC s’élève à 1353 € net, soit 6,6 % sur un an, mais pour la même période, l’inflation a été 6,2 %.

Le salaire minimum français se situe au 6e rang européen derrière le Luxembourg, la Belgique, l’Irlande, les Pays-Bas et l’Allemagne. 

29 décembre – Taïwan, le service militaire rallongé à un an 

Taïwan s’apprête à allonger de quatre mois à un an le service militaire obligatoire, a annoncé, mardi 27 décembre, la présidente Tsai Ing-wen : « Le service militaire actuel de quatre mois n’est pas suffisant pour répondre à la situation en constante et rapide évolution. Je dois reconnaître que c’est une décision très difficile à prendre, mais, comme présidente et commandante en chef de nos forces armées, il est de ma responsabilité incontournable de protéger l’intérêt de la nation, la pérennité de Taïwan, ainsi que la liberté des générations à venir ». Une référence aux vues chinoises sur ce territoire de 24 millions d’habitants, dont Pékin ne reconnaît pas l’indépendance.

Le jeu est aussi de politique interne, alors que les présidentielles sont dans un an. Le principal parti d’opposition, le Parti nationaliste chinois, qui avait diminué la durée du service militaire lors qu’il était au pouvoir, va devoir se prononcer.