Le départ de M’hamed KHADDAD nous plonge dans une infinie tristesse, et je présente mes plus sincères condoléances à sa famille, ses amis et son peuple.

Cela fait huit ans que très régulièrement, nous avions à travailler ensemble pour défendre l’application du droit sur le territoire du Sahara occidental. Depuis le premier jour, cette rencontre a été un bonheur. Lors de notre première rencontre, M’hamed a su, comme personne, me faire comprendre en quelques heures ce qu’était le peuple Sahraoui, et pourquoi il n’y avait d’autres voies que l’application stricte du droit international pour défendre son droit à l’autodétermination.

M’hamed avait une connaissance encyclopédique du dossier, sur tous les aspects. Il s’est montré remarquablement disponible pour comprendre les contraintes des procédures en droit européen. À chaque étape, c’étaient des discussions approfondies, car l’action juridique n’a de sens que si elle est au service de l’action politique, et il fallait la meilleure des coordinations. Cet homme qui savait tant, qui avait vu tant de choses, était toujours curieux d’apprendre et de découvrir, et il expliquait souvent que pour atteindre la victoire, il fallait que nous soyons plus connaisseurs et plus rapides que les forces adverses. Devant les auditoires les plus divers, il savait en quelques minutes brosser une analyse politique limpide, identifiant les rapports de forces et les voies à rechercher.

Je garde comme un souvenir inégalé, avec une émotion intacte, la lecture de l’arrêt du 21 décembre 2016 de la Cour de Justice, à Luxembourg. Je l’entends encore analyser à voix basse au fur et à mesure de sa lecture : « deux territoires distincts et séparés, occupation militaire, résolution 34/37, consentement du peuple Sahraoui… c’est excellent, excellent ».

Ce travailleur infatigable était toujours disponible, et il ne négligeait aucun effort. Devant une vie si noble et une personnalité si riche, c’est ce soir mon admiration qui domine, mais il y a aussi une rage devant ces adversaires sans scrupules, qui ne tiennent leur pouvoir que par le vol de la richesse d’un peuple. C’est une rage profonde car la coalition des intérêts criminels a empêché M’hamed de connaître l’indépendance de son pays.

Cette injustice, qui frappe dans son entier un peuple pacifique, uni et respectueux du droit, ne fait que redoubler ma détermination. Dans mes yeux, le visage de M’hamed est désormais gravé sur toutes les pages de nos actes de procédure, et je veux dire à sa famille et au peuple Sahraoui que celui qui a été pendant ses huit ans un ami de tous les jours, a été pour moi le meilleur des professeurs de politique. C’était un vrai artisan de la paix, sa confiance m’a porté, et oui, nous n’aurons de repos qu’avec l’indépendance.